Knowledge is a deadly friend when no one sets the rules. The fate of all mankind I see is in the hands of fools. King Crimson - Epitaph (1969)

Uber... alles !

Écrit par Paul Renard. Publié dans Humeurs du moment

Récemment, le Préfet du Nord a pris un arrêté interdisant l'application Uber, suite à la demande des chauffeurs de taxi professionnels. Uber permet en effet à des particuliers de réserver en ligne une course en voiture... de particulier. Moins cher pour le "client", tout bénéf' pour le propriétaire de la voiture. A priori, cela parait plutôt sympa, même s'il s'agit d'une concurrence déloyale pour des professionnels qui, eux, paient très cher une licence pour exercer leur métier et qui sont soumis aux charges sociales des entrepreneurs. En dehors de ce débat sur la concurrence, qu'est donc en réalité Uber ? Aux USA, où est né ce concept "Uber", l'entreprise de chauffeurs privés est valorisée à hauteur de 40 milliards de $. Quoi de plus sympa que de devenir son propre patron en louant ses services à des heures perdues ? Mais si on y réfléchit bien les "chauffeurs" s'enchaînent volontairement à leur volant pour gagner quelques euros supplémentaires. De la servitude volontaire. Et au final, qui est le gagnant ? Uber bien évidemment qui prélève sa commission sur les courses ! Et si Uber n'enrichit pas les chauffeurs, il ruine les taxis.

 

Et tout métier risque ainsi d'être "ubérisé" : vous possédez une maison ? Devenez hôtelier ! Vous savez bricoler ? Louez vos talents ! Et puis, au final, plus rien ne vous protègera : ni votre plaque de taxi, ni vos diplômes. Cette soi-disant économie du partage où tout peut être loué ou acheté, comme les réservations d'hôtel ou de restaurant par exemple. Et peu importe si les professionnels en profitent ou pas. L'Uber capitalisme se fiche de ses conventions. Désormais, plus rien ne sera gratuit, même une simple réservation !

Encore un exemple : pour 3 000 $, la société Tesla vous vend une batterie suffisamment puissante pour stocker l'énergie que vous achetez lorsqu'elle est la moins chère (heures creuses) ou que vous avez produite grâce à vos panneaux solaires. Et si vous en avez en trop, l'ubérisation vous permet de la vendre via le réseau !

Tout cela marque une radicalisation de l'ultra libéralisme qui, au final, accouchera d'un nouveau monopole, unique et définitif : Uber. La boucle sera bouclée, et, dès lors, il sera trop tard pour revenir en arrière.

(source : Charlie Hebdo n° 1192)